Le syndrome de l’imposteur toujours aussi féminin ?​

Pensive woman with hot beverage at home

Le syndrome de l’imposteur touche une femme sur 2. La proportion de femmes persuadées de ne pas être à leur place est toujours aussi forte. Réalité ou mythe ?


« J’ai ma propre boîte depuis 5 ans, je réalise un superbe chiffre d’affaires, je suis respectée par mes pairs… Et pourtant régulièrement je me dis que tout pourra s’arrêter et que l’on découvrira que je suis une supercherie ».
Malika, 37 ans, entrepreneure

Malika souffre du syndrome de l’imposteur. Ce sentiment d’être inapte ou de ne pas mériter ses succès malgré les preuves du contraire. C’est le cas de Malika. Elle dispose de tous les indices qui prouvent qu’elle est au sommet de sa réussite, qu’elle est compétente, qu’on lui fait confiance. Mais elle vit avec la peur de décevoir, de rater une étape. L’échec la terrifie tellement qu’elle pense que si elle en rencontre un, c’est toute sa carrière et même sa carrière qui vont être remis en question.

Ce mécanisme psychologique est de plus en plus convoqué dans les témoignages de professionnelles, dans les cabinets de thérapeutes ou dans les études sociologiques.

Ce phénomène touche les deux sexes, mais il a longtemps été associé de manière prédominante aux femmes. A tort ou à raison ?

D’où vient le syndrome de l’imposteur ?

Ce n’est pas par hasard que le syndrome de l’imposteur s’est installé auprès d’un public plutôt féminin. Globalement dans le monde, les femmes ont dû surmonter des barrières sociales et professionnelles pour accéder à des postes de responsabilité.

Le syndrome de l’imposteur s’est donc développé comme une réponse psychologique à ces défis, les femmes pouvant se sentir inadéquates malgré leurs réussites.

Les psychologues, Pauline Clance et Susanne Imes ont compris ce phénomène en 1978. Lors d’une enquête auprès des dirigeantes d’entreprises, elles ont découvert la perception que ces femmes avaient d’elles-mêmes. A travers des entretiens, elles ont demandé aux dirigeantes d’évaluer leurs compétences, puis à leurs collaborateurs de leur faire. Elles ont ainsi découvert que les femmes avaient tendance à se sous-estimer, lorsque leurs collègues voyaient davantage leurs qualités.

« Lorsque je demande des recommandations à mes anciens employeurs, je suis toujours étonnée du ton dithyrambique employé. Je ne me reconnais pas dans les qualités qu’ils évoquent. Je finis par me convaincre qu’ils en rajoutent une couche pour être sûrs que j’obtiendrai mon futur poste »
Emma, 32 ans, consultante

Le syndrome de l’imposteur encore plus prégnant chez les jeunes femmes ou encore celles qui se considèrent comme des transfuges de classe. C’est le cas d’Emma, dont vous venez de lire la citation. Emma vient d’un milieu modeste et d’une petite ville dans l’est de la France. Elle a fait les meilleurs écoles de commerce et travaille désormais pour d’importants cabinets de consulting. Elle n’a plus de preuves à faire. Pourtant il lui est impossible de se délivrer du syndrome de l’imposteur. Le fait de travailler dans des capitales européennes pour des entreprises internationales la perturbe. Elle se considère comme « un bug dans la matrice, ça n’aurait pas dû arriver ».

Cette idée persistante la maintient dans cet état d’illégitimité perpétuelle.

Comme Emma, les jeunes femmes qui, de plus ont dû s’extraire d’une condition sociale modeste renforcent ce syndrome d’imposteur à cause de la bataille qu’elles ont mené pour construire un autre avenir que celui auquel la société les prédestinait.

Sortir du cadre, appuie chez ces personnes le sentiment qu’elles ne sont pas censées être à cet endroit, à ce poste, dans cette position.

La quête perpétuelle de la perfection

Les femmes, souvent confrontées à des attentes élevées en matière de performance au travail et dans leur vie personnelle, peuvent ressentir une pression accrue pour atteindre la perfection. Cette quête perpétuelle peut nourrir le syndrome de l’imposteur, les amenant à douter de leurs compétences malgré des réussites évidentes.

La culture du travail, parfois compétitive et axée sur la performance, peut accentuer le syndrome de l’imposteur chez les femmes. La comparaison constante avec leurs pairs et le sentiment de devoir prouver leur légitimité peuvent être des facteurs prédisposant à ce phénomène.

Les attentes « traditionnelles » de nombreuses sociétés, concernant les rôles féminins, peuvent entraîner des doutes sur les capacités professionnelles, même lorsque la réalité démontre le contraire.

Déconstruire ce mythe

Le syndrome de l’imposteur peut être déconstruit de plusieurs manières :

  • La multiplication d’expériences. Leur réussite deviennent une série de preuves que ce syndrome n’est qu’une invention de l’esprit. Les faits peuvent prendre le dessus de cette peur irrationnelle.
  • Encourager un dialogue ouvert sur la confiance en soi et la reconnaissance des succès est essentiel pour soutenir les femmes dans leur cheminement professionnel.
  • Les thérapies. Elles sont nombreuses : psychothérapie, psychanalyse, hypnothérapie, groupes de parole, art-thérapie, etc. Ces pratiques permettent d’identifier le noeud originel qui irrigue et entretient le syndrome de l’imposteur, particulièrement chez les femmes.
  • La sensibilisation aux réalités du syndrome de l’imposteur et éduquer sur ses mécanismes peut contribuer à briser les stigmates associés aux femmes et à ce phénomène. En parler publiquement, a aidé de nombreuses femmes ces dernières années à le nommer et l’identifier.
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